| | | Giovanni Vermeer« Rend moi spécial ! »
 24.02.17 10:39 Tu marches dans les tas d’ordures, tu as l’habitude de croiser des ordures dans la rue. Celles-là te rassurent parce qu’au moins elles ne mentent pas sur ce qu’elles sont. Rouillées, cassées, abîmées, délaissées, elles paraissent plus vivantes que les cadavres que tu vois marcher tous les jours. Tes doigts longs et glabres se resserrent sur une petite poupée de chiffon. Rose, pouponne, avec d’adorables couettes blondes, tu l’aimes déjà. Pourtant, ses petits vêtements sont chiffonnés et déchirés, tu les recoudras. Ses cheveux sont emmêlés et tu les démêleras. Elle a été délaissée, tu l’aimeras. Alors, un sourire étrange se dessine sur ton visage. Un sourire d’enfant sur un visage d’adulte. Un véritable sourire sous la couche de maquillage dont tu te badigeonnes le visage tous les matins. Tu aimes bien être ce clown, tu aimes avoir l’air toujours heureux. Pourtant un voile d’inquiétude passe sur ton visage. Une silhouette au loin se dessine au loin. Viens-t-elle clamer ta décharge dont tu es le souverain incontesté ? Tu te redresses tout de go et tu dévales les déchets pour te retrouver face à la personne. La poupée se trouve encore dans ta main. Charlotte viendra avec toi partout désormais. Tu la répareras comme personne ne t’a réparé toi. Tu t’en occuperas bien. Tu la protègeras de cet inconnu que tu connais peut-être d’ailleurs. Tu es tellement étourdi que tu peux parfaitement l’avoir oublié. Tu es tellement perdu que tu ne sais même pas pourquoi ta propre conscience s’adresse à toi à la seconde personne. Ça ne te déplait pas, ça te donne l’impression d’avoir un ami qui est toujours là pour toi. Ton boa rose et plumeux traine presque sur le sol. Tes cheveux sont dans le même état que celui de la poupée. Alors provocateur, fronçant les sourcils comme un chiot qui grognerait contre un ennemi, tu t’adresses à cet inconnu.
« Qui es-tu ? Que veux-tu ? Tu es venu voler Charlotte ? » Tu n’es pas très convaincant, tu ne parais pas menaçant malgré tes mains longues comme des pattes d’araignée et tes jambes trop grandes pour toi. Pourtant, tu essaies. Tu essaies vraiment.
 | | | 05.03.17 23:27 Fredi était chanceux aujourd'hui : la journée s'était passée sans encombres, son déjeuner ne lui avait presque rien coûté. Il s'était fait réprimander une ou deux fois parce qu'il bougeait trop mais n'importe qui finirait par être impatient de sortir à force de rester collé à une table à écouter de vieux croûtons étaler leur science d'une voix monotone.
C'était une bonne journée, pour sûr ! A peine la cloche avait sonné que l'adolescent se ruait à la sortie, son sac jeté sur ses épaules, ses cours déjà oubliés. Ce soir, personne ne l'attendrait, il pourrait arpenter Madison de long en large son récent mais toujours fidèle compagnon à ces côtés. Muffin était loin d'être parfait. Le jeune garçon ne savait pas encore si c'était la fougue de la jeunesse, mais le jeune chien n'avait décidément peur de rien, doublée d'une vraie tête de mule. Si bien que, lorsque ce n'était pas Fredigan qui allait traîner au mauvais en droit au mauvais moment, c'était l'animal qui les embarquait dans les embrouilles. Et malgré tous ses efforts pour dompter la bête, l'adolescent n'était pas arrivé à grand-chose. Pourtant, au fond de lui, il était convaincu que Muffin était parfait pour lui. La solitude ne pesait plus sur ses épaules, ne le faisait plus traîner des pieds. Les nuits à se geler dehors à la belle étoile n'était plus si froide. Les ruelles sombres et bondées n'étaient plus si effrayantes.
Finalement, l'heure était venue de se trouver un abri pour la nuit et ils s'étaient dirigés vers la décharge. La journée s'était trop bien passée pour la terminer avec une rencontre malencontreuse, alors Fredi s'était tourné vers la décharge, pensant y trouver une tranquillité relative et surtout une carcasse de voiture pas trop amochée ou un grand frigo pas trop sale.
C'est seulement lorsque Muffin commence à aboyer que le garçon se rend compte qu'il n'est pas tout seul. Connaissant son chien, il se penche et l'attrape avant que ce dernier ne parte vers l'inconnu. Beaucoup trop de courage dans cette boule de poils, vraiment. Plus l'individu se rapprochait, plus le garçon se sentait nerveux. L'apparence de l'homme n'avait rien de rassurant, ici, au milieu d'une décharge. Fredi serra un peu plus Muffin contre lui, plus pour se rassurer qu'autre chose. Les rumeurs étaient claires, un homme maquillé en clown avec un boa au milieu d'une décharge, ce n'est jamais bon signe pour vous ou votre chien et il était hors de question de laisser cet inconnu transformer Muffin en manteau !
A l'accusation du grand homme, l'adolescent enfouit la moitié de son visage dans la fourrure violette de l'animal coincé dans ses bras. Il dut se saisir de tout son courage pour parler d'une voix claire. « Je m'appelle Fredigan et ça c'est Muffin. » Il souleva un peu plus son compagnon pour mieux le présenter. « Je... Cherche juste une vieille voiture. Et, euh... » Il marqua une pause le temps de relever la tête et de regarder aux alentours sans vraiment savoir ce qu'il cherchait. « Qui est Charlotte ? Et, et... Vous faites quoi ici, vous ? »
Fredi ne savait pas si questionner l'inconnu en retour était vraiment une bonne idée, mais aussi suspicieux qu'il pouvait paraître, il n'avait pas l'air méchant, et ça, c'était tout ce qu'il fallait pour intéresser le garçon. | | | Giovanni Vermeer« Rend moi spécial ! »
05.09.17 10:11
Giovanni avait froncé les sourcils mais il s’était immédiatement adouci à la vue de Muffin. Circonspect, il s’était approché comme s’il avait été le roi de la décharge et qu’on venait lui disputer sa couronne. Il fit le tour de Fredigan pour se donner une idée mentale de l’intégralité du jeune garçon. Il se pencha finalement alors qu’il se trouvait derrière lui décidant de répondre à sa question d’un ton impérieux. « C’est elle » dit-il avec une certaine émotion dans la voix alors qu’il montrait la poupée désarticulée avec une grande fierté. Elle se trouvait à moins de cinquante centimètres du visage de Fredigan. Ce qui ne semblait pas particulièrement dérangé Giovanni. Gesticulant, incapable de rester statique pendant plus de quelques minutes, il finit par se remettre devant lui pointant un doigt accusateur. « Qui viendrait chercher une vieille voiture dans une décharge ? C’est suspect ce que tu racontes. » Les mimiques de l’adulte ressemblaient à s’y méprendre à celle d’un enfant de huit ans qu’on a contrarié. Il était comme ça le roi dégingandé mi- enfant mi-flamand. On ne pouvait pas sérieusement le qualifier d’homme adulte lorsqu’on le voyait se grimer dans toutes sortes de costume et vivre une vie qui n’’avait pas un sens prédéfini. Il vivait au-delà des contraintes et des règles sociales car il ne parvenait tout simplement pas à se les remémorer. Finalement, il appuya sur le nez du garçon en faisant un petit « boop » sonore en rigolant un peu. « Haha, t’as pas l’air trop méchant. » Lestement, il se laissa tomber en face de Fredigan l’observant de ses yeux tantôt doux tantôt fous. Si Giovanni avait été un personnage de la littérature, il aurait certainement bu le thé souvent avec le chapelier fou. « C’est quoi ton nom ? Moi c’est Giovanni » lâcha-t-il dans un sourire soudainement plus calme et moins tonitruant que d’ordinaire.
| | | 27.11.17 20:23 Un petit rongeur apeuré autour duquel tournait un gigantesque rapace. A cette pensée, Fred se recroquevilla un peu plus autour de la chaleur réconfortante de Muffin encore dans ses bras. L’inconnu le jaugeait, sans l’ombre d’un doute et dès le premier coup d’œil il était facile de trouver le vainqueur si cette rencontre finissait en bagarre. La différence de taille n’était que plus flagrante de près, si bien que l’adolescent ne put s’empêcher de sursauter au moment des présentations avec ‘Charlotte’. L’adorable Charlotte, la petite Charlotte maltraitée moins par le temps que par des propriétaires négligents. Et pourtant, elle semblait si mignonne avec sa robe rose délavée, décousue, déchirée par endroit, avec ses cheveux blonds décoiffés. Encore loin de sa grandeur d’antan, elle était déjà à sa place, en sécurité, entre ces longs doigts qui ne manqueraient sûrement pas de la remettre sur pieds. Il détourna le regard.
Doucement, Fredi sentit son angoisse glisser au loin. D’un coup, le géant n’était plus si effrayant que ça. Imprévisible et déroutant, pour sûr, mais pas dangereux. Son comportement enfantin finit par arracher un léger sourire au plus jeune. Au final, Fredigan déposa doucement Muffin au sol, tout danger n’était pas écarté mais le chiot commençait à s’agacer et le jeune garçon avait de bonnes raisons de se détendre un peu. Après tout, la chance était de son côté aujourd’hui, n’est-ce pas ?
Il mit tout de même un instant avant de s’asseoir en face de Giovanni. Le temps ne les attendrait pas et une fois le soleil couché, les choses se compliqueraient pour lui. Mais, pour une fois, il allait mettre ses soucis de côté et profiter un peu ! C’était suffisamment rare de trouver quelqu’un pour faire la conversation alors il n’allait pas cracher sur l’occasion quand son interlocuteur avait en plus l’air gentil, ou au moins doté d’un cœur. Il aurait sûrement besoin de s’armer de patience mais ça, il en avait à revendre.
« Vous pouvez m’appeler Fred ! Et ça c’est Muffin. » ajouta-t-il en pointant la boule de poils qui furetait autour de Giovanni, le jaugeant à son tour. « J’cherche une voiture qui servirait plus, c’est pas pour rouler, juste pour un abri contre le vent le temps d’une nuit. Du coup, une décharge c’est le bon endroit, non ? Et vous, vous traînez souvent dans les décharge pour récupérer des objets à rafistoler ? » | | | |
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