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Au détour d'une névrose [Harper Reeves]
wanted
Sulkan Zaslavski
Sulkan Zaslavski
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07.12.15 18:13
On dit souvent que seul le temps efface les blessures. Malheureusement pour lui, les souvenirs de cette journée cauchemardesque étaient encore trop présents dans son esprit pour que le garçon fût en mesure d’oublier le visage de cet Eraser, déformé par la folie grondante à l’intérieur. Il ne comptait plus le nombre de fois où il s’était redressé en sursaut, à peine les paupières closes ou au beau milieu de la nuit quand il parvenait finalement à s’assoupir pour quelques heures de salut, avec l’expression exaltée par la perspective de l’attraper de cet homme imprimée sur la rétine. Etre un hackeur commettant des délits pour le compte des uns et des autres était une chose. Se savoir traqué par ce fou furieux dérangé au possible en était une autre. Les premiers jours se révélèrent être un calvaire. Tant pour le fugitif que pour son hôte, laquelle l’était devenu bien malgré elle. La peur le rongeait de l’intérieur, son esprit affolé imaginait mille manières de voir venir la mort en personne. Chaque fois que quelqu’un poussait la porte de la boutique, Sulkan s’attendait à voir débarquer l’Eraser. Ruben avait beau lui assurer qu’ils ne le retrouveraient pas de sitôt – parce qu’il fallait déjà établir un lien entre eux, ce qui n’était pas évident à première vue puisque tout les opposait – la terreur changée en nervosité permanente à l’encontre du moindre bruit suspect ne disparaissait pas. Le garçon essayait de s’en convaincre, que son hôte disait la vérité, c’était plus facile à dire qu’à faire. Autant que de reconnaître qu’ils étaient à présent des congénères… Pris dans la même galère.

Après l’angoisse vint le désespoir. Il ne pouvait plus nier. Il n’était plus ce qu’il était, un humain, sans trop de problèmes. Dorénavant, sa principale source d’inquiétudes était son nouveau statut d’Evolve en cavale. Jamais l’illégalité n’avait revêtit un goût aussi amer à ses yeux. Doucement, le jeune hackeur tenta de réintégrer le monde réel, aidé en cela par la présence de son hôte. Il fit de son mieux pour aider Ruben à gérer la boutique. Constat plus consternant encore, il finit par trouver apaisant le mélange d’herbes aromatiques et de fleurs qui flottait en permanence entre les murs de l’échoppe. Celui-là même qui lui avait irrité les sinus tout au long de sa séquestration ici même plusieurs mois auparavant. Les journées se succédaient alors, semblables les unes aux autres. Le dialogue, difficile au début, se fit plus fluide entre eux, même s’ils ne parlaient jamais plus que nécessaire. Curieuse situation que de se représenter deux parfaits étrangers, contraints de cohabiter par un cas de force majeure, sans pour autant s’apprécier. Sulkan apprit l’humilité. Tout comme il se retrouva forcé de respecter ce qu’était la jeune femme, la même aberration que lui à présent. Son égo l’encaissa, non sans mal.

Cependant, il lui apparut bien vite que cette colocation improvisée sur le tas, sans réel but autre que celui de le cacher aux yeux de ses poursuivants, ressemblait davantage à une prison inespérée qu’autre chose. Une petite partie de lui-même culpabilisait à l’idée de créer des ennuis à Ruben, qui avait été bien aimable de l’accueillir chez elle après tout le mal qu’il lui avait causé. En cela, le jeune hackeur ne pouvait rien dire. L’interrogation qui couvait en lui quant aux motivations de son hôte pour agir de la sorte avait été rapidement étouffée par le besoin de se trouver un toit. Ainsi qu’un visage familier dans le tourbillon d’émotions dans lequel cette banale visite à l’hôpital l’avait jeté. Maintenant, son égo le poussait vers la sortie. Certes, il ne connaissait rien de la vie des Evolves illégaux mais ce ne pouvait pas être plus dur que celle d’un criminel endurci, non ? Et surtout, il y avait toujours une sortie de secours. Pour avoir longtemps traîné du côté de l’Entre-Deux, le garçon savait toutes les saloperies qui s’y tramaient et ce qu’on pouvait y dénicher, moyennant quoi beaucoup de chance et d’argent. Sans compter ces nombreuses rumeurs… Poussé à la fois par l’espoir et la nécessité, Sulkan se risqua finalement à quitter la boutique, pour quelques heures pensait-il.

Sa destination ? L’Entre-Deux et ses laboratoires clandestins. La rumeur laissait courir le bruit d’un vaccin contre ce qui faisait des humains, des Evolves. Et si certains d’entre eux assumaient pleinement leur nouveau statut face au reste de la société de Madison, le garçon le leur cédait bien volontiers. Il n’eut pas de mal à atteindre l’enchevêtrement de bâtiments en ruines, même en rasant de près les murs. Rares étaient les passants qui faisaient attention à vous de ce côté de la ville. Et les patrouilles d’Erasers étaient annoncées à des kilomètres à la ronde par des relayeurs motivés. De quoi lui permettre d’atteindre son but sans rencontrer de difficultés particulières. Non, ce qui se révéla plus compliqué par la suite, fut de trouver quelqu’un, un connaisseur, capable de le conduire aux bonnes personnes. Par chance, il était un habitué des lieux et des trafics qui s’y déroulaient à l’abri des regards. Mieux valait tenir sa langue et taire le plus longtemps possible la raison de sa venue en de pareils lieux. De clients, on avait vite fait de devenir marchandises là où la loi ne s’appliquait plus, pas plus que les libertés individuelles. Du coin de l’œil, Sulkan aperçut l’homme avant même que ce dernier n’ouvre la bouche pour s’adresser à lui :

« Tu cherches qu’que chose gamin ? »

Borgne avec la cigarette callée paresseusement au coin des lèvres, lesquelles étaient agitées de tics nerveux. Manque ? Mauvaise habitude ? Pas vraiment le genre d’individu à qui on accordait sa confiance de toute évidence. Bien que le terme choisi pour le désigner fût loin de lui convenir, le jeune hackeur prit le temps de détailler l’autre des pieds à la tête, avec un signe évident de dédain.

« T’as quoi à m’proposer l’épave ? »

Le visage de son interlocuteur se fendit d’un large sourire, ou plutôt d’une fente tirant sur le rictus et qui laissait apparaître une dentition pour le moins en mauvais état. Difficile de différencier les dents cariées de celles qui étaient fausses… Le garçon écouta les propositions de l’inconnu, sans faire mine d’être intéressé par l’une d’entre elles. Les expressions comptaient beaucoup ici-bas et le moindre battement de cil pouvait laisser penser que l’autre vous tenait. Finalement, il soupira bruyamment et lâcha :

« J’cherche un vaccin. Ce vaccin. »

C’était là où tout allait se jouer. Les deux interlocuteurs se toisèrent longuement, dans un silence pesant au milieu du brouhaha alentour causé par les diverses affaires qui se négociaient ci et là. Au bout de ce qui lui parut être une éternité, l’homme jeta sa cigarette au sol pour l’aplatir d’un coup de semelle avant de lui faire signe de le suivre à travers le dédale de bâtiments en ruines. L’air circula de nouveau dans les poumons du garçon, qui ne se rappelait pas avoir retenu sa respiration, dans l’attente d’une réponse favorable. A ce stade de la négociation, il aurait encore pu prendre ses jambes à son cou. Mais c’était sans se douter de ce qui l’attendait. La première chose qu’il vit lorsqu’il rouvrit les yeux, ce fut une lumière éblouissante, qui enveloppait tout. Sulkan cligna des yeux, à plusieurs reprises, dans l’espoir que cette impression se dissipa progressivement afin qu’il puisse savoir où il se trouvait, peine perdue. La lumière persista et il reporta ses efforts pour tenter de retracer le déroulement des événements qui l’avaient conduit dans une telle situation. A quel moment lui avait-elle échappé précisément ? N’aurait-il pas dû faire demi-tour en apercevant ce groupe d’hommes ? Il le savait pourtant, l’Entre-Deux n’était régi par aucune loi, disons, morale.

Sa bouche était pâteuse et sa nuque douloureuse. Un coup peut-être ? Ce qui expliquerait comment il avait perdu connaissance. Le jeune hackeur voulut se redresser mais un vertige le prit. Attaché il ne l’était pas mais il peine à se remettre de l’inconscience dans laquelle on l’avait plongé de force. A moins que… Quelque chose jaillit de la lumière. Un masque respiratoire. Son premier réflexe fut de tourner la tête, rassemblant ainsi le peu de forces et de volonté qui subsistait en lui. La main tenant le masque n’insiste pas et des bribes de conversation lui parvinrent de loin, quelques fois entrecoupées de rires gras. Qu’est-ce qu’on lui avait fait respirer ?! L’avait-on drogué ? Pour empêcher toute tentative de fuite de sa part ? Sulkan se fit violence pour s’enquérir de sa situation actuelle. Il se trouvait allongé sur un lit de fortune aux allures de table d’opération, dans une pièce délabrée à en juger par l’état des murs qu’il commençait tout juste à distinguer en dépit de la lumière aveuglante des néons au-dessus de lui. Dans quel merdier s’était-il fourré au juste ? Un visage se dessina alors au-dessus de lui, vers la droite. Il le reconnut aussitôt : le type grimaçant à la cigarette.

« Ça va piquer un peu gamin. Nous en veux pas mais ton foie là, il nous intéresse. Et ptètre un rein ou deux. Tu fumes dis ? »

En guise de réponse, il essuya un crachat de la part de son patient, ce qui valut à ce dernier une bonne droite. Malgré les jurons qui s’échappaient de la bouche de son interlocuteur, déjà disposé à lui appliquer de force le masque pour l’endormir – même si on pouvait douter de l’efficacité de ce genre de produit en pareille situation puisque la santé des patients n’était pas la priorité de ces médecins – Sulkan sentit que le coup, couplé à la douleur qui suivit naturellement, venait de lui remettre les idées en place. Du coin de l’œil, il avisa la pompe ajustant l’envoi du produit et lorsque le masque s’approcha de nouveau de lui, le garçon n’attendit pas qu’une poigne ferme se referme sur sa mâchoire pour le contraindre à l’immobilité. Il repoussa une première fois le masque et l’arracha des mains de l’inconnu pour le diriger droit vers les yeux de ce dernier. De sa main libre, il actionna la pompe et les hurlements de l’homme le poursuivirent, même après qu’il parvint à se traîner hors de la salle d’opération improvisée sous les ruines. Il fallait qu’il se tire d’ici et vite. Sauf que la tête lui tournait toujours et que sans l’appui du mur sur sa droite, il se serait écroulé depuis belle lurette. A tout moment, il s’imaginait sentir la poigne de l’homme s’abattre sur son épaule pour le ramener dans la pièce délabrée aux vieux néons. Pourvu qu’il atteigne une sortie avant que cet instant n’arrive !
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26.12.15 14:28
Une nuit comme une autre à faire le mur. À mon âge, je ne devrais même plus appeler cela ainsi car après tout je suis libre de sortir quand bon me semble. Mais j'ai toujours l'impression de trahir un peu mes parents de m'éclipser comme un voleur pendant leur sommeil. Je sais qu'ils se doutent de quelque chose, voir qu'ils connaissent les raisons de mes échappées nocturnes. Ce qui me perturbe c'est que malgré cela ils ne m'en touchent pas un mot. Pourtant ils seront les premiers touchés si quiconque apprend que le fils Reeves traîne la nuit au marché noir pour acheter sa dose ; l'inconvénient majeur d'être de ces personnes avec une certaine notoriété à Madison. Déjà que mère à été contrainte de démissionner à cause de moi, elle qui faisait partie du groupe politique anti-evolve... Elle n'a même pas revu son jugement ; juste qu'avec moi c'est différent car je suis son fils et que par conséquent j'ai été bien élevé, que je ne suis pas un de ces sauvages dans la rue qui s'attaquent aux innocents. Autant dire que lorsqu'elle tient ce genre de discours, je me contente de lever les yeux au ciel et ne l'écoute pas vraiment. Si elle s'entendait parler...

...et si elle apprenait qu'à force d'aller au marché interdit son petit Harpy chéri commence à connaître -ou du moins reconnaître- du monde là-bas... À chaque fois que je m'y rends, c'est pour aller à l'espèce de long bâtiment où est rassemblé pas mal de matériel médical volé, ou ancien et réhabilité de deux trois tours de clef à molette ; à chaque fois que je m'y rends je croise le même type sur ma route, un gars qui doit avoir le même âge que moi, qui m'appelle Lovely Pain d'une voix traînante, qui me répète sans cesse que mon air torturé lui a tapé dans l’œil...
Et que ça lui ferait plaisir que je me le tape lui.

— Allez... J'suis gentil, j'te fais un prix !

Sans doute suis-je parano, mais il me semble qu'il en a plus après ma poudre qu'autre chose. Et un rail vaut certainement plus cher que tout ce qu'il peut proposer avec son corps.
Alors je l'ignore et pénètre dans le bâtiment pour aller à la rencontre du dealer que je viens trouver régulièrement. Marché passé sans encombre comme d'habitude, toujours des recommandations inutiles de sa part comme si j'étais assez bête pour tout prendre d'un coup, pas un merci, pas un au revoir, mais un silence qui laisse entendre un à bientôt. Comme d'habitude.
Si je jouis en ces lieux de l'anonymat, passant pour un camé de seconde zone avec mes traits tirés et mes vêtements sombres sans forme, ce n'est pas pour autant que je ne crains pas pour ma vie à chaque fois que je viens. Loin du candide à peine sorti de sa prison dorée, j'ai pleinement conscience que ne serait-ce que pour me subtiliser ce que je viens d'acquérir, certains seraient prêts à me tuer. Probablement pour ça que sans vraiment y réfléchir je cache toujours un couteau de cuisine dans ma chaussette droite en priant fort fort fort pour ne jamais avoir à l'utiliser.

Je ressors dans le couloir après avoir caché le sachet dans la doublure de ma veste que j'ai décousu à un endroit exprès pour ce faire. Un bruit de course sur ma gauche et j'ai à peine le temps de voir arriver quelqu'un que la personne me rentre dedans et nous fait tomber tous deux au sol.
Décharge d'adrénaline. Je le repousse de toutes mes maigres forces -heureusement, il n'est pas lourd- et me relève aussitôt pour reculer de deux pas. L'observer. Un gamin aux cheveux verts.
Et sur ses talons deux hommes qui viennent vers nous à toute vitesse, armés, l'air enragé.

Je saisis l'adolescent à l'épaule par son vêtement et le tire à l'intérieur de la salle que je viens de quitter, refermant la porte derrière moi en m'y adossant. Le dealer encore là, penché sur ses préparations nous lance un regard circonspect.
Pourquoi ai-je agi de la sorte ? Ce garçon peut très bien être n'importe quoi, n'importe qui, et les types à ses trousses des gens voulant lui faire payer une crapulerie ! Pourtant, pas le temps pour poser la moindre question car soudain la fuite prends une toute autre dimension pour moi : si je suis en train de l'aider à s'enfuir, rien ne garantit ma survie. Les hommes dont les pas se rapprochent derrière la porte ne sont probablement pas le genre à faire de cadeau ni à se sentir menacés par une allumette de mon espèce.

Par là, indiqué-je à l'inconnu en passant devant lui pour passer dans une salle annexe, lui faisant signe de me suivre.

L'air y est froid et pour cause, là, une fenêtre à guillotine brisée dont seule la partie supérieure est intacte quoique noircie par le manque d’entretien. Aucune chance qu'elle ne s'ouvre aussi va-t-il falloir passer entre les éclats de verre encore raccrochés au cadre de PVC sale.
Je bloque la porte avec une chaise dans un éclair de lucidité et, qu'importe si l'autre est sorti ou pas en empruntant cette échappatoire improvisée, moi, je passe au travers sans attendre une seconde de plus. Prenant garde à ne pas me blesser, un morceau de tissu noir se déchire sur une pointe de verre et reste en place alors qu'une fois dehors, je cherche aussitôt lequel de droite ou de gauche est le meilleur chemin pour s'enfuir.
Un regard au type avec un drôle de look. Lui connaît peut-être mieux que moi le marché noir. Dans le meilleur des cas il a sans doute même une idée d'où aller pour se planquer...et je risque bien de l'y suivre.
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Sulkan Zaslavski
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30.12.15 0:52
Pris dans la course fiévreuse qui devait mettre le plus de distance entre lui et ses poursuivants, le garçon ne vit que trop tard la silhouette noire qui jaillit d’une possible porte située sur sa droite. A vrai dire, il la sentit avant même de la voir en la percutant de plein fouet. Le choc de cette rencontre brutale lui coupa le souffle. Emporté dans son élan, il n’eut pas la présence d’esprit de se rattraper à autre chose que l’inconnu en question lors de sa chute, l’entraînant avec lui dans le même temps. Chose qui ne plut à son interlocuteur malchanceux, lequel ne se fit pas prier pour le repousser dans la seconde qui suivit la chute de concert. Sulkan, qui avait tenté de retrouver son équilibre au même moment, le perdit de nouveau. Un juron en russe lui échappa, à l’intention de l’inconnu mais il doutait que ce dernier l’ait compris, ne serait-ce qu’entendu. Il aurait pu moins le bousculer ! Sa tête lui tournait toujours, les effets de son état léthargique précédent ne s’étaient pas complètement dissipés. Pas le temps de se poser plus de questions ou de maudire davantage l’intéressé. Voilà que ce dernier l’attrape par l’épaule, le redressant sans ménagement – un poil contradictoire compte tenu de sa réaction antérieure – et le pousse devant lui. L’esprit fiévreux du jeune hackeur analysera brièvement cette issue comme étant la porte d’où était sorti l’inconnu quelques minutes plus tôt.

Un brin de panique naquit de plus belle lorsqu’un nouveau visage inconnu se tourne vers lui. Des traits qui ne lui sont pas familiers. Et une expression qui, à défaut d’être accueillante, ne s’en trouve pas menaçante pour autant. Le garçon respira. Qui que soit cet individu, il ne risquait pas de lui sauter à la gorge. Un coup d’œil furtif en direction des mains de l’autre renseigna aussitôt Sulkan sur la raison de sa présence en ces lieux. Un dealer ? Entre hors-la-loi, ils devaient probablement bien s’entendre non ? L’espace d’une fraction de secondes, il songea vaguement à l’idée de lui acheter un peu de cette saloperie qui, néanmoins, savait vous faire planer en moins de deux. Peut-être que ça l’aider à oublier ce qu’il était vraisemblablement devenu aux yeux de la société : un fugitif mutant. Seulement, la voix de son sauveur improvisé lui parvint à ce moment précis, le tirant de ses pensées moroses. Faute d’avoir mieux à faire, il lui emboîta le pas, peu désireux de rebrousser chemin pour se retrouver nez-à-nez avec ses poursuivants et ce, même en découvrant l’issue que lui offrait l’inconnu. Le jeune hackeur inspira un bon coup et se lança, maladroitement. Il n’était pas un sportif de nature et son temps de réaction était considérablement réduit.

L’adrénaline aidant, il parvint tout de même à se glisser entre les éclats de verre restants. L’air frais lui fit du bien et Sulkan s’autorisa une longue bouffée. Pur ou non, il lui remettait les idées en place. A tel point que ses méninges s’activent de nouveau, envisageant le chemin le plus court pour quitter le marché noir et trouver un abri. Retourner chez Ruben dans cet état était une optique mais… Du mouvement à ses côtés lui rappela à qui il devait la vie. Plus ou moins. Après tout, il ne l’avait pas tiré physiquement parlant, des griffes de ses poursuivants ! Simplement entraîné avec lui dans une pièce adjacente, mettant une distance raisonnable entre lui et les autres, avant de finalement lui permettre de regagner la surface. Le garçon hésita. Depuis longtemps, il hésitait sur la marche à suivre. Les récents événements, la cohabitation avec sa congénère Evolve – et assumée – l’avait obligé à maintes reprises à revoir ses positions. Cet individu lui était venu en aide, d’une manière ou d’une autre et ce, sans la moindre raison pour le faire. Dans la gratuité la plus totale – jusqu’à présent – alors même qu’il se mettait en danger personnellement en essayant de l’aider à échapper à ses poursuivants.

« Merci… » finit par lâcher le jeune hackeur, du bout des lèvres.

L’inconnu ne s’en doutait très certainement pas mais ces remerciements, à la limite de l’impolitesse et de l’ingratitude, étaient la meilleure chose qu’il pourrait tirer de Sulkan à ce stade. Des mois auparavant, il n’aurait même pas daigné murmurer ce mot à l’encontre de quiconque. D’un coup d’œil jeté en diagonale aux alentours, le jeune hackeur parvint à les situer.

« Par là. » ajouta-t-il au bout de quelques secondes, comme en écho des seules paroles de son sauveur.

Sans réellement lui laisser le temps de peser le pour et le contre quant à son sens de l’orientation, le garçon se mit en route. C’était une manière comme une autre de ne pas s’attarder sur le fait qu’il venait de remercier une personne. Une autre, en plus de Ruben elle-même. A mesure qu’ils progressaient, des images lui revenaient en mémoire. De jour, comme de nuit, plus récemment, il avait déjà mis les pieds dans le marché noir. Sous un autre statut certes mais chaque détail, chaque indice qui lui permettait d’en sortir au plus vite était précieux. Pour la simple et bonne raison qu’il ignorait tout de la position exacte de ses poursuivants et que ces derniers chercheraient également à le coincer dans l’un des nombreux carrefours de l’endroit. Finalement, d’autres sons que ceux que leurs pas produisaient parvinrent à leurs oreilles et l’étrange duo atteignit la partie supérieure du marché noir, à savoir les petits commerces qui n’avaient pas besoin de se terrer dans les recoins sombres pour exercer plus ou moins librement. Ce genre d’échoppes vendaient principalement des objets du quotidien, qu’il était parfois, souvent même, difficile de se procurer, en raison des nombreuses restrictions gouvernementales. Pour les objets n’appartenant pas à cette époque, il fallait effectuer les transactions à l’abri des regards. C’était également le cas pour le vaccin que recherchait Sulkan. Même sans la moindre garantie qu’il puisse seulement exister. C’était l’aspect providentiel du marché noir qui attirait toujours autant. Toutes les âmes désespérées y avaient rendez-vous. Malheureusement pour elles, les prédateurs y étaient également nombreux. Et pas uniquement sous la forme de patrouilles d’Erasers…

« Essayez de ne pas vous faire remarquer. »

Décidément, c’était l’hôpital qui se foutait de l’infirmerie ! Le jeune hackeur choisit cet instant précis pour rabattre la capuche de son sweat sur sa tête, masquant ainsi le haut de son visage. S’il gardait les yeux détournés des visages qu’ils croisaient, alors il y avait une chance pour qu’ils se tirent de là indemnes. Possibilité qui s’envola aussitôt que des exclamations éclatèrent derrière eux :

« Retrouvez moi ce gosse bordel de merde ! Dégagez le passage ! »

Cette voix. Même sans se retourner, Sulkan aurait deviné de qui il s’agissait. Seulement voilà, il fit bien de jeter un coup d’œil par-dessus son épaule : leurs poursuivants n’étaient qu’à une dizaine de mètres derrière eux, fendant la foule en bousculant tous ceux qui se risquaient dans leur passage, volontairement ou non d’ailleurs. S’ils continuaient à tenter de se la jouer discret en marchant normalement, les autres auraient tôt fait de les rattraper… Sitôt que le constat lui apparut, le garçon saisit le bras de son sauveur.

« Cours. »

« Ils sont là ! Je les vois ! Rattrapez-les ! »

Ce qui n’était pas tellement dans les projets des cibles présumées puisqu’elles se mirent à courir, dans une fuite éperdue en avant, bousculant de plus belle les passants, sans songer à perdre la moindre seconde en excuses débitées à toute vitesse. Leur course leur permit de quitter pour de bon le marché noir, retrouvant un dédale de couloirs plongés dans une semi pénombre. Et bientôt, le silence. Retour aux ruelles faiblement éclairées de l’Entre-deux. Leurs poursuivants ne se risqueraient pas à les suivre jusqu’ici seulement, Sulkan doutait de pouvoir remettre les pieds de sitôt au marché noir. Il pouvait faire une croix sur ce prétendu vaccin. Avisant une porte mal entretenue sur sa gauche, appartenant à un bâtiment en ruines, le jeune hackeur s’arrêta devant. Un coup de pied. La porte grinça. Un second ne tarda pas à suivre et cette fois, elle pivota sur elle-même en grinçant de plus belle. Pour la discrétion, on repasserait. Cependant, il doutait que quiconque ne les attendit de pied ferme à l’intérieur, étant donné l’état de la demeure en question. Dans le pire des cas, ils dérangeraient un squatteur ou deux mais pour être un habitué de ces pratiques, le garçon n’avait aucun doute quant à sa capacité à négocier deux places supplémentaires, de manière temporaire qui plus est. Heureusement ou malheureusement pour lui, il n’eut pas à mettre son talent à l’épreuve puisque les lieux étaient déserts.

« Ils ne nous suivront pas jusqu’ici. Mais refermez la porte derrière vous. Ou ce qu’il en reste. »

De son côté, Sulkan s’activa pour dégager quelques espaces dans les fenêtres recouvertes de taules, afin qu’un minimum de lumière puisse filtrer et ainsi éclairer leur planque provisoire. En revenant du côté de l’inconnu – dont il songeait à obtenir le nom sous peu, nouvel exploit à ses yeux -, le garçon croisa le regard de ce dernier, dirigé vers son haut.

« Quoi ? Y’a un problème ? » lâcha-t-il avec humeur.

Ce ne fut que lorsqu’il posa justement son attention sur son sweat, qu’il découvrit la raison de l’expression inhabituelle de son interlocuteur. Une tâche sombre s’élargissait à vue d’œil au niveau de sa hanche gauche. Sous l’effet de l’adrénaline, la douleur s’était estompée, inexistante. A présent qu’ils étaient de nouveau en sécurité, son cerveau tirait la sonnette d’alarme et il grimaça sous la douleur. Depuis quand… ? La lumière ne tarda pas à se faire dans son esprit : la fenêtre à guillotine et ses éclats de verre restants. Il ne voyait que ça. A moins que ces malades ne l’aient déjà charcuté pendant son inconscience ? Sulkan devint livide et il entreprit aussitôt de retirer son haut, même si le moindre geste le contraignait à serrer les dents pour ne pas gémir de douleur.
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